Il n’y a pas si longtemps, ma grand-mère voyait ce qu’elle cuisinait.
Il n’y a pas si longtemps, elle était très coquette.
Il n’y a pas si longtemps, elle ne voulait pas ouvrir le cadeau qu’on lui avait offert sous prétexte qu’en secouant la boite, elle se doutait que celui-ci comportait des chaussons et qu’elle en avait déjà assez. (elle a fini par les porter et même les aimer.)
Il n’y a pas si longtemps, elle touchait mes gilets et savait dire avec quels points, ils étaient tricotés.
Il n’y a pas si longtemps, ma soeur et moi déplumions son sapin de Noël de tous ses chocolats.
Il n’y a pas si longtemps, je me fabriquais avec un de ses tabourets en formica jaune un magnifique vaisseau spatial et arpentais son couloir en long, en large et en travers.
Il n’y a pas si longtemps, le dimanche, nous mangions chez elle du lapin que je ne mangeais pas.

Il n’y a pas si longtemps, mon père m’a raconté que lorsqu’il était enfant, il s’était retrouvé dans un pommier à attendre la fin du monde.
Il n’y a pas si longtemps, je me suis dit que je devrais peut être faire la même chose.

Le temps passe trop vite et quelques fois s’arrête.
Puis tout doucement, reprend.

Lorsque j’observe ma mère, je me dis que la pomme a bien fait de tomber et de rester près de l’arbre.